MESSAGE N°2 – Traversée Nouvelle-Zélande – Nouvelle-Calédonie
Vendredi 8 Avril 2011.
A 12H00 locales, cela fait 48 heures que nous avons appareillé d’Opua.
Je lis l’écran du GPS. Opua est maintenant à 369 milles dans le sillage, et le chenal Sud de Noumea à 496 milles devant. 369 milles en 2 jours de mer, ce n’est pas trop mal, presque 185 milles par 24 h00, c’est 15 milles de mieux que la moyenne journalière idéale que nous nous sommes assignés pour une traversée en 5 jours. Mais les conditions hier après-midi étaient particulièrement bonnes : vent portant de SW de 18 à
22 nœuds, mer peu formée ne ralentissant pas le bateau, vent apparent soufflant du travers bâbord, et longues glissades sur un océan redevenu parfaitement bleu, après les eaux vertes de la Baie des Iles. La vitesse, assez souvent entre 9 et 11 nœuds, a même parois atteint plus de 14 nœuds…(Dans ces cas-là, j’évite de croiser le regard de Barbara !) Il faut dire que nous avions grand-voile haute et gennaker, et que nous affichions au pilote le cap idéal pour aller vite, à quelques 15° à droite de la route directe. La rotation du vent du SW au SE étant prévue pour le lendemain, il sera alors temps de revenir sur la gauche du plan d’eau. Les éclaircies ont alterné avec les grains, et il a fallu plusieurs fois enrouler le gennaker et dérouler le solent, et vice versa. Un grand albatros, probablement venu des Iles Kermadec, est venu assister pendant quelques instants aux manœuvres de l’équipage de Jangada, avant de reprendre ses interminables boucles aériennes en quête de quelque nourriture. L’eau de mer est remontée à 22°C, plus que 6 à 7°C pour que je m’y sente à l’aise… C’est que je me suis fait tremper copieux en manoeuvrant à l’avant, un bain de mer encore un peu frais à mon goût ! Rinçage obligatoire du marin et de ses fringues à l’eau douce. Avec nos derniers dollars néo-zélandais, Barbara avait acheté au general store d’Opua, quelques minutes avant de larguer les amarres, une belle pizza au fromage, dont la cuisson hier soir a empli le carré de Jangada d’une senteur alléchante de ruelle d’Italie du Sud…Cette nuit, Adélie a encore tenu compagnie à sa Maman dans la cabine milieu bâbord, et Marin a dormi dans le carré à bâbord. J’ai retrouvé mon petit coin à tribord pour une autre longue nuit de 12 heures, entrecoupée de brèves rondes. J’ai eu du mal à capter la station radio Sailmail de Firefly, sur la côte australienne, et c’est seulement vers 02H00 du matin que les messages e-mails sont arrivés à bord, au compte-goutte. Mystère de la propagation des ondes radio-électriques au-dessus des océans. Le vent a commencé à tourner en mollissant vers 04H00 du matin, la grand-voile a commencé à battre dans les hauts, la vitesse a chuté à 4 nœuds… Le vent, comme prévu, a faibli, et la vitesse moyenne est en chute libre ! J’en ai profité pour démarrer un moteur, recharger les batteries, et faire de l’eau douce avec le déssalinisateur d’eau de mer. Quand c’est le moteur bâbord qui fonctionne, un échangeur installé sur son circuit d’échappement fabrique de l’eau chaude qui est stockée dans un ballon.
Au matin, c’est un vrai petit bonheur technologique de prendre, au beau milieu de l’océan, une douche chaude (presque) comme à la maison (enfin la vôtre, parce que la nôtre…) Après le petit-déjeuner, grandes manœuvres : le gennaker est retourné dans son coffre de pont, la grand-voile a été affalée, et John Deere, le grand spi vert de vent arrière a pris le relais. Mais la distance journalière de demain ne sera pas bonne. Vivement que le vent passe sur l’autre bord ! Le carré, dans la journée, se transforme en salon de lecture, les meilleures places y sont chères… Ainsi va la vie aux antipodes !
Olivier