Distance de Horta (Ile de Faial, Açores) en route directe 1264 milles.
Distance directe à Furna (Ile de Brava, Cap Vert) 180 milles. Distance réelle parcourue en 24 heures 152 milles.
Gain sur la route directe en 24 heures 139 milles.
Shaker’s week…
Beaucoup de nid de poules sur la route… On a beau essayer de les éviter, on tombe souvent dedans, et avec fracas ! Paquets de mer, embruns, giclées sur les vitres du roof, et chocs… Les premières 24 heures de mer ont été éprouvantes. Le vent fort, la mer formée, le cap serré. Et puis, psychologiquement, il faut se faire à l’idée qu’il y en a pour une semaine à ce régime, c’est assez peu enthousiasmant, il faut bien l’avouer. Le bateau souffre, le mât, le gréement, les voiles, l’accastillage sont durement sollicités, et la peur de l’avarie est présente en permanence à l’esprit .
La nuit a été plutôt difficile. J’ai été chercher, ce qui est déjà en soi une expédition à haut risque (au moins pour le taux d’humidité relevé à l’arrivée !), mon matériel de couchage en bas (cabine bâbord), et je me suis installé à ma place habituelle dans le carré à tribord, pour la nuit. Beige et Petit Brun (pour ceux qui connaissent) sont restés au chaud en bas. Après sa cuisine et sa vaisselle, toutes deux sportives dans les conditions actuelles, Louis m’a demandé quel quart il allait faire, mais je lui ai répondu qu’il pouvait aller dormir en bas à tribord, et que je l’appellerai seulement si c’était nécessaire. Nous avons allumé le feu flash de tête de mât, pour signaler aux éventuels navires marchands qu’un voilier taillait sa route dans le coin contre le vent et la mer vers les Açores, mais il n’y a pas foule dans le quartier. Evidemment, mon fiston m’a manqué à bâbord du carré, où il dormait. Nous faisions un peu la converse le soir, quand les filles étaient déjà couchées, jusqu’à ce que je m’aperçoive qu’il s’était endormi. Et depuis qu’il m’avait montré, il y a seulement quelques semaines, la fonctionnalité « liste de lecture » avec sélection aléatoire sur mon I Pod, j’avais passé du temps à regrouper dessus « toute la musique que j’aime », et à la nuit tombée, c’était concert dans le carré de Jangada, sur la base Bose.
Mais au mouillage à Fogo, un être malveillant s’est introduit à bord pendant notre absence, et il a volé, entre autres choses, mon I Pod… J’ai ainsi perdu « toute la musique que j’aime »… Cette nuit, les choses se sont compliquées quand nous sommes passés sous le vent des îles de Santo Antao et de Sao Vicente, à une vingtaine de milles. Il y a une accélération connue du vent dans le goulet entre ces deux îles, qui se prolonge loin au large. L’anémomètre est monté à 32/33 nœuds pendant 2 heures, m’obligeant à enrouler le solent aux 2/3. Ca cognait dur. Santo Antao est une île élevée, alors ensuite, nous avons été déventés, moins de 10 nœuds de vent. Et deux heures de moteur pour nous extirper de la zone de dévent. En fin de nuit, le manque de régularité du zéphyr m’a obligé à de nombreux réglages, bref il m’est arrivé de passer de meilleures nuits en mer. Au jour, après un petit-déjeuner vite expédié, nous avons enroulé le solent et mis en fuite à 160° du vent pour une heure de menus travaux acrobatiques à l’avant. Séquelle de la nuit, le jonc polyester du trampoline bâbord avait trouvé le moyen de perforer le tissu PVC pourtant solide et renforcé de son gousset, et il avait posé une option pour rejoindre les grands fonds. En ce moment, en avant du mât, la sérénité fait un peu défaut… Mais, une fois l’archipel du Cap Vert définitivement derrière nous, le vent a un petit peu adonné, et nous naviguons désormais à 55/60° du vent, ce qui est mieux. Le bateau souffre moins, et nous réglons la voilure pour maintenir une vitesse de l’ordre de 8 nœuds. Au-delà, ça rappelle la bataille de Verdun, à laquelle je n’ai tout de même pas participé.
Bon, pour autant, le confort des allures portantes est loin, oublié hélas, les impacts sont toujours là, et l’aspersion reste de rigueur, mais il y a une petite amélioration. C’est cette tendance à venir un peu vers l’est de l’alizé de nord-est, prévue pour encore 4 ou 5 jours, qui nous a décidés à appareiller vers les Açores. Cela nous permet de maintenir un cap à 20° environ plus à l’ouest que la route directe vers Horta, et cela sans trop serrer le vent ni la mer, exactement ce que je souhaitais. Etre sûr d’enrouler l’anticyclone des Açores par sa bordure ouest (perspective de vents plus portants), et non pas par sa bordure est (vents assurés dans la gueule), ce sera le deuxième objectif. Bref, nous avons attaqué notre route incurvée vers l’ouest. Il faudrait que cette tendance persiste pendant encore 5 jours, et le plus dur serait derrière. Par la suite, il va nous falloir surveiller l’évolution de la position de l’anticyclone, pour en tirer les conséquences sur la route à suivre. Si la bête pouvait prolonger un peu son séjour dans la partie orientale de sa cour de récréation, ce serait une bonne idée.
Mais en attendant, c’est le shaker. Jangada version Orangina… Un Dimanche laborieux… Sailmail marche bien avec la station belge Osy que je capte désormais facilement en BLU le soir vers 19H00. Les messages de soutien sont les bienvenus !
A demain !
Olivier