dimanche 10 juin 2012

Billet N°161 - Sao Jorge, le grand navire immobile…

Du Jeudi 3 au Dimanche 6 Mai 2012 -
Par Olivier

J’aime l’île de Sao Jorge, ce grand navire de pierre de plus de 50 km de longueur sur 7 km de large en moyenne, ancré au milieu de l’océan. Le temps, la vie s’y écoulent paisiblement, au milieu de paysages verdoyants étonnamment bucoliques.

Sao Jorge et ses fajas, terres de lave basses qui s’étendent sur la mer au pied de falaises boisées aux pentes impressionnantes. Sur ces langues de terres nées de l’épanchement des volcans  et gagnées sur la mer, les maisons traditionnelles des insulaires ont su traverser les âges. Chaque habitation a son jardin clos de murs de pierres sombres, où poussent arbres fruitiers et légumes, et quelques arpents de vigne. La terre y est riche, l’eau coule en abondance, le soleil n’est pas avare de ses apparitions.

Sao Jorge vit essentiellement de l’élevage des vaches. Viande, lait, beurre, fromages, et produits dérivés. Le plateau de Sao Jorge, constitué de milliers de prairies verdoyantes à l’herbe grasse, est situé à environ 300 mètres d’altitude. Les murs de pierre et les haies d’hortensias séparent le parcelles que l’homme a défrichées il y a plus de 500 ans. Le fromage de Sao Jorge est réputé être le meilleur des Açores. Il y a quelques décennies, les vaches se rendaient même à la nage sur l’îlot de Topo, à l’est de l’île, pour y prendre leurs quartiers d’été. Quelque chose comme un demi mille nautique à nager, un petit kilomètre, quoi. Mieux valait choisir son jour. Comme si les pâturages étaient rares, à Sao Jorge. Chaque soir, les éleveurs se rendent avec leur 4x4 à la station de traite des vaches laitières, implantée en pleine prairie, et pour autant conforme à la réglementation européenne. J’ai observé le manège des animaux : ils sont contents de s’y rendre, et ne se font pas prier pour entrer dans les stalles. Il n’y a pas plus heureux qu’une vache laitière aux Açores…

A Sao Jorge, j’aime les moinhos, les vieux moulins à vents. Rouges, blancs, ou bleus. Ils ont cessé de moudre le grain, mais se dressent encore dans les vents d’ouest, oubliant que leurs pales sont désormais attachées, et leurs mécanismes rouillés.

J’aime aussi la petite marina de Velas, toute neuve, nichée contre la falaise où nichent les incroyables cagarros, ces fameux puffins (de Cory) ou puffins cendrés qui, la nuit venue, vous organisent un incroyable concert de cris de bébés en pleurs. Le cagarro mesure 50 cm de longueur environ, avec une envergure supérieure à 1 mètre. C’est un oiseau de l’hémisphère nord, qui vit dans les îles de l’Atlantique, de façon grégaire. Il se nourrit de petits poissons, de céphalopodes, de crustacés, et de méduses. Autant il est silencieux en mer, autant il est bruyant à terre, pendant la période de nidification, qui commence en Mai-Juin. On s’habitue vite à ses lamentations nocturnes, déroutantes au début, qui se terminent généralement au milieu de la nuit.

J’ai un faible pour la randonnée qui, du haut du plateau de Sao Jorge, par un petit sentier dont le départ est difficile à trouver, descend en lacets vers la faja da Caldeira de Santo Cristo, au milieu des hortensias en fleurs. De cette faja isolée à laquelle aucune route ne parvient, un sentier côtier vous ramène vers la faja dos Cubres, plus à l’ouest, reliée elle par une petite route escarpée souvent traversée d’éboulis, vers le village de Norte Pequeno.

Mais cette fois, j’ai découvert une autre faja, sur la côte sud cette fois : celle de Sao Joao. Une petite merveille. Vieilles maisons de pierre sur lesquelles le temps semble s’être arrêté, ruelles pavées de galets de basalte, murs de pierres à l’infini pour protéger du vent les vieux pieds de vigne, figuiers tortueux par dizaines, fontaines d’eau publiques en pierres de lave et chapelles brûlées de soleil. Seul l’accès à la mer et le ravitaillement restent difficiles.

Mais la faja de Sao Joao, qui fait face au sud, donne envie de s’arrêter pour vivre quelques temps aux Açores. En harmonie avec la nature. Loin des trépidations souvent inutiles du monde…

 
Photo 1 - Jangada amarré dans la petite marina de Velas, à Sao Jorge...
Photo 2 - Les fajas de Sao Jorge, au pied d'impressionnantes falaises...
Photo 3 - Faja das Funduras, côte nord de Sao Jorge...
Photo 4 - Jolies maisons traditionnelles des fajas de Sao Jorge...
Photo 5 - Clocher de la chapelle, faja das Pontas, Sao Jorge...
Photo 6 - Paysage de Sao Tome, sur le plateau de Sao Jorge, à l'est...
Photo 7 - Culture de la vigne en terrasse, à Topo, Sao Jorge...
Photo 8 - Station de traite des vaches laitières, à Sao Jorge...
Photo 9 - Moulin à céréales du côté d'Urzelina, Sao Jorge...
Photo 10 - Celui-çi vient d'être refait à neuf...
Photo 11 - ... cet autre a le charme de l'âge...
Photo 12 - ... et celui-là celui des teintes pastel...
Photo 13 - L'église de Santa-Barbara, bien sûr...
Photo 14 - Un bel azulejo de village...
Photo 15 - Aux Açores, le capitaine a du se rhabiller, ça sent la fin des vacances...