Distance parcourue à midi :1248 milles Distance restant à parcourir :106 milles
Distance parcourue en 24H00 162 milles
Il y a souvent des petits avatars sur les voiliers en voyage. Le matériel est mis à rude épreuve au fil du temps. La nuit précédente, j’avais été réveillé dans mon sommeil léger par la chute d’un objet métallique sur le pont. Rarement une bonne nouvelle… Avec ma lampe frontale, j’avais vite trouvé une petite flasque en inox et une entretoise avec une vis. Je connais plutôt bien notre bateau, mais là j’ai eu un doute. Tête de mât ? Poulies de bosses de ris ? Inspection nocturne des organes essentiels, puis report de la résolution de l’énigme au petit jour. Réponse : poulie de bosse du 3ème ris. La précédente avait déjà fait un plongeon il y a quelques mois ! Malgré un montage au frein filet, cette poulie, toujours en l’air mais rarement en service, encaisse des milliers de vibrations sur la chute de grand-voile, qui viennent toujours à bout du montage. Je croyais avoir perdu l’autre flasque, mais, chose incroyable, Marin l’a retrouvée à l’avant, sur le trampoline bâbord ! J’ai du mal à comprendre comment elle a pu arriver là ! Même la deuxième vis fraisée, dernier élément manquant du puzzle, a été retrouvée enfouie dans l’écoute de solent au pied du winch. Il y a des jours comme çà. Ce matin, c’est un écrou pourtant freiné aussi (« nil stop ») qui est dégringolé du 5ème chariot de latte de GV. A chaque fois, il faut affaler, réparer, renvoyer. J’en profite pour apprendre à Marin qu’en mer, il ne faut jamais laisser traîner une situation technique qui présente une anomalie, un risque de dégradation ultérieur, même s’il n’apparaît pas évident au départ.
Intervenir rapidement (et parfois immédiatement, si nécessaire), pour revenir le plus tôt possible à un bon niveau de fiabilité technique général. L’expérience montre que pratiquement dans tous les cas, les évènements de mer résultent de la conjonction de plusieurs causes qui s’associent malheureusement pour provoquer une situation technique irrécupérable. Cela me rappelle le naufrage du voilier La Tortue, aux Tonga, il y a quelques mois, qui n’a pas échappé à cette règle. Je serai curieux de savoir ce que mon fiston aura retenu de cette expérience autour du monde, sur ce plan là aussi. Il me suffit d’attendre à vrai dire. Il est adroit de ses mains, comprend vite la technique, est devenu précieux pour moi à bord. Il règne en maître au pied du mât, c’est son territoire. Il connaît par cœur tous les cordages, les coinceurs, les winches, l’usage du guindeau, les réglages, les vérifications. J’ai toujours un petit pincement au cœur quand je décide de le réveiller en pleine nuit pour qu’il m’aide dans une manœuvre, mais sa croissance n’a pas l’air d’en souffrir : il sera bientôt aussi grand que moi !
A quelques dizaines de milles de notre arrivée à Richards Bay, c’est l’incertitude météo qui domine. Une dépression orageuse est localisée sur Richards Bay. Elle peut encore nous jouer un tour. On espère un vent de nord-est 20/25 nœuds tournant nord, qui serait parfait pour se présenter dans le chenal demain au lever du jour, mais les conditions sont très changeantes ici, alors… On sent que l’approche du continent met en jeu dans le coin des forces puissantes. Ce qui est sûr, c’est qu’il ne fera pas bon être en approche de Richards Bay à partir de Dimanche. 40 à 45 nœuds de sud contre le courant des Aiguilles ! Pas une bonne idée… Allez, encore un petit coup de pouce dans le dos, et on sera à l’abri !
A demain !
Olivier