samedi 12 novembre 2011

MESSAGE N°9 – TRAVERSEE REUNION – AFRIQUE du SUD

Samedi 12 Novembre 2011 – Jour 9

Distance parcourue à midi  1354 milles       Distance restant à parcourir  0 milles

Dernier message !

Arrivés à Richards Bay !

Bon, la nuit a été courte pour le Captain. C’est le lot habituel qui accompagne les atterrissages en pleine nuit ! J’ai dû dormir 2 heures, je vais me rattraper ce soir. Comme prévu par les cartes météo, le vent a repris du nord-est hier en milieu d’après-midi, en grimpant à une vingtaine de nœuds, ce qui a fait glisser Jangada à 8/10 nœuds sur l’eau. Il nous restait une bonne cinquantaine de milles à abattre au coucher blafard du soleil, ce qui laissait entrevoir une arrivée au creux de la nuit. De son côté, l’examen de la carte permettait d’envisager d’entrer sereinement dans ce grand port lagunaire bien balisé, fréquenté par de gros vraquiers à fort tirant d’eau. Alors il fût décidé de ne pas freiner l’allure pour attendre le jour. Banzaï !

Quelques heures plus tôt, le baromètre électronique avait déclenché son alarme sonore de chute rapide de la pression atmosphérique, signe que nous rentrions de plein fouet dans la dépression localisée sur Richards Bay… Je n’avais pas envie de traîner en mer, au risque de prendre 35 nœuds de vent dans le nez à 30 milles de l’arrivée. Vers minuit, le vent a montré des vitamines, soufflant à 30/35 nœuds en refusant au nord, nous obligeant à prendre un 2ème ris et à enrouler du solent. Vitesse

10/11 nœuds, embruns salés, paquets de mer. Une zarrivée au scrash !

Contact VHF avec le port de Richards Bay vers 01H00 du matin. Le phare de Santa Lucia apparaissait dans le nord-ouest. Café, re-café, rere-café, suivi de la route fond sur l’ordinateur, vérifications GPS.

Contrôle de la dérive due au courant. Vers 02H30, Marin et moi avons affalé  la toile et fait route vers le chenal. A 03H00, nous franchissions les brise-lames, la pleine lune jouait avec les nuages qui couraient bas dans le ciel. Soudain, le calme de la rivière, le chenal, les bouées rouges et vertes. Les senteurs de la terre humide, l’odeur de la vase. Un pays nouveau ! 90° à droite au 4ème couple de bouées, direction le small crafts harbour et la marina de Tuzi Gazi. A 03H45, amarrés à couple d’un bateau local, j’ai mis le chadburn sur TPLM (« Terminé pour la machine »). Nous voilà en Afrique du Sud ! 8 jours et demi de mer pour cette traversée, je suis très content ! Magie d’arriver par la mer, en voyageurs, dans un pays que l’on ne connaît pas. Les filles du bord dormaient profondément. J’ai été somnoler en attendant le jour, vite arrivé. La première chose qui m’a surprise…vous n’allez pas me croire ! il a fallu que je me pince et que j’y regarde à 2 fois : il y avait des singes partout sur le quai, sur les toits alentour aussi !!!

Ils montaient sur les voiliers, habités ou pas, pénétraient discrètement dans les bateaux dont les descentes étaient restées ouvertes, ressortaient avec un paquet de biscuits, un sachet de chips ou un ananas, s’installaient dans les cockpits, et se mettaient tranquillement à bouffer ! En en foutant partout of course, l’horreur. Parfois, un monkey maladroit renversait un objet, un verre, une bouteille. Ca faisait du bruit, ca coulait partout. Pas suffisant pour réveiller les marins endormis… Je suis allé sur le quai, ils m’ont gardé à l’œil, visiblement habitués à être chassés sans ménagement. Certains faisaient les poubelles, en les renversant, c’est plus commode. D’autres escaladaient les gréements et les toits, il en avait plusieurs dizaines ! J’hallucinais ! Puis ils ont disparu, chassés par le réveil de la ville. Leur heure de prédilection, c’est le lever du jour, ils sont en pleine forme !

L’officier d’immigration est venu vers 09H00, mais celui des douanes s’est fait attendre. On en a profité pour rincer le bateau, pour tout lessiver. L’eau douce au bout d’un tuyau, vous ne savez pas ce que c’est ! C’est un luxe inouï. Vous l’avez oublié, vous ne le savez plus ! Quel bonheur simple ! Et puis pour fêter notre arrivée, nous avons été déjeuner dans un petit resto sur le port. Double burgers pour Barbara et les enfants, jarret de porc grillé pour moi ; et frites pour tout le monde. Ben oui ! Des visages noirs très typés, des ethnies qu’on ne connaît pas. Zulus ? Des blancs aussi, des métis, des indiens : pas de tension sensible, on se dit bonjour, on se sourit. Dans ce pays traumatisé (j’ai commencé à lire Il n’y a pas d’avenir sans pardon, de l’archevêque anglican du Cap et prix Nobel de la Paix Desmond Tutu, un bouquin passionnant), on a envie de saluer tout le monde. J’ai rigolé avec l’officier d’immigration, j’ai éclaté de rire avec l’officier des douanes, plus blacks que blacks. En discutant avec des marins locaux, nous avons appris qu’il y a quelques jours, au sud de Madagascar où nous venons de passer, un voilier sud-africain, une famille avec 5 personnes à bord, qui terminait un tour du monde en rentrant ici chez eux, a heurté un container qui flottait entre deux eaux. Choc violent, voie d’eau importante immédiate, abandon. Juste le temps de monter dans le radeau de sauvetage et de déclencher une balise ! Récupérés 7 heures plus tard par un cargo qui faisait route vers Singapour, ils ont été débarqués en rade de Port-Louis, à l’île Maurice. Pas terrible comme fin de voyage, dans la dernière ligne droite… Nul doute qu’il faut aussi un peu de chance pour réussir.

Puis nous avons quitté Tuzi Gazi pour la petite rivière du Zululand Yacht Club. Nous sommes bien installés, tout à côté d’un parc verdoyant, d’une petite piscine, d’une petite plage. Pas question de se baigner :

eau trouble à 23°C, méduses, crocodiles, et requins.

L’Afrique, à nouveau, mais par un bout encore inconnu. L’Océan Indien touche à sa fin. Enfin presque… Merci de nous avoir suivis sur la mer jolie !

Et à bientôt peut-être, pour d’autres aventures, au Lesotho, ou dans le parc animalier d’Hluhluwe- Imfolozi ?

Olivier

Fin des messages de la traversée Réunion – Afrique du Sud