Nous profitons d’une orientation légèrement plus nord du maraamu, qui nous permet de remonter au près (j’adore !) sur un seul bord vers Raiatea, pour quitter Bora Bora et, après quelques heures, entrons dans le lagon de l’île sacrée des anciens Polynésiens par la passe Toamaro, au sud-ouest de l’île.
Nous retrouvons le calme des lagons, et, après un nouveau repérage en annexe par les enfants, nous nous faufilons entre les « patates » et allons mouiller tout près du motu Nao Nao, exactement au sud de Raiatea. Il y a 20 cm d’eau sous les quilles. Le bateau semble posé sur le sable.
Ce mouillage fera sûrement partie de mon « top five » des mouillages de Polynésie.
Peut-être est-ce du en partie à l’aspect sauvage et préservée du site, en comparaison avec le lagon de Bora Bora où les motus sont pris d’assaut par les hôtels…
Ici les « jardins de corail » sont de vrais jardins de corail, vivants, colorés et poissonneux à souhait.
Adélie et son amie Capucine entreprennent de cartographier les fonds sous marins aux alentours du bateau. Elles partent masquées et palmées, des heures durant, pour explorer le lagon, remontent à bord et dessinent des cartes en donnant des noms aux patates de coraux, aux allées sous marines, aux poissons multicolores...
Je me régale de les voir si inventives et créatives.
Timothée et Marin chassent avec les arbalètes sous-marines.
Olivier affectionne les randonnées en kayak près du platier intérieur.
Je fais mes longueurs de nage le long de la plage immaculée du motu.
Seul un requin de lagon à pointes blanches viendra, un jour, me contraindre à rentrer à bord sur le kayak du Capitaine…
Raiatea, île haute au relief prononcé, est l’île principale des Iles sous le Vent, très bien desservie par les avions d’Air Tahiti et les « goélettes » pays. Pour autant Raiatea est une île très nature et bien préservée, tournée essentiellement vers l’agriculture.
Aucune plage sur l’île sauf sur les motus, pas d’infrastructure hôtelière importante, plutôt des pensions de famille.
Raiatea est surnommée « Raiatea la Sacrée » par les Polynésiens car aux temps anciens, elle était le centre culturel, religieux et historique des Iles de la Société. Son rayonnement allait jusqu’en Nouvelle Zélande, et touchait toute la population maorie des îles du Pacifique.
Elle possède le site archéologique le plus connu des Iles sous le Vent, le marae Taputapuaeta. Ce marae, au sud-est de l’île, près du village d’Opoa, est particulièrement bien restauré et entretenu, et il s’en dégage une impression grandiose.
Tout nouveau marae sur les îles voisines devait incorporer une pierre du marae Taputapuatea, à titre d’allégeance et afin de symboliser le lignage spirituel. De nombreuses pancartes explicatives facilitent la compréhension des lieux, qui ont vu, jusqu’à la fin du 18ème siècle, se dérouler des sacrifices … humains.
Je me passionne pour la culture polynésienne, mais pas les enfants que les pierres basaltiques sombres du marae laissent …de marbre !
En revanche la visite qui suivra d’une exploitation de vanille les captivera bien plus.
Olivier avait rencontré Odette Tauatiti à une exposition sur la vanille lors de notre passage à Tahiti. Il lui avait expliqué que nous passerions quelques semaines plus tard à Raiatea. Odette avait alors proposé à Olivier de nous faire visiter la plantation de vanille familiale, lors de notre passage. Nous appelons donc Odette, et rendez-vous est pris pour le lendemain matin. Nous mouillons la veille au soir à Avéra, sur la côte est de l’île, commune où se situe l’exploitation. Le lendemain matin, Guy, son mari, vient nous chercher dans son 4X4, et nous emmène découvrir les ombrières, à l’ombre desquelles les lianes de vanille poussent, bien protégées des oiseaux, du soleil, et de la pluie. La culture de la vanille, une orchidée, est très délicate et assez technique. Le « mariage de la vanille », fécondation de la fleur, est pratiquée à la main, et nécessite de la dextérité. La fleur sur laquelle la fécondation a réussi (90%) se transforme alors progressivement en plusieurs gousses vertes. Neuf mois plus tard, les gousses déjà brunes sont récoltées et mises à sécher avec soin pendant 4 à 5 mois ; elles sont ensuite triées, calibrées puis empaquetées avant d’être commercialisées à Papeete ou exportées.
Mais c’est souvent là que le bât blesse : la commercialisation… Pas de label AOC pour l’instant, un gouvernement polynésien assez peu efficace, Guy et Odette sont aidés par leur fils installé à Papeete pour essayer de trouver des débouchés à leur produit du terroir polynésien. Odette doit se rendre début août à un salon à Nice pour faire connaître sa vanille. Les investissements sont considérables, les retours aléatoires, à ceci s’ajoute le changement climatique qui perturbe la floraison, très en retard cette année.
Je vous donne leur site Internet, si vous souhaitez commander de la vanille de qualité : www.hotu-vanilla.pf . Guy et Odette sont des polynésiens entreprenants, accueillants et chaleureux. Ils ont compris qu’ils ne devaient compter que sur eux-mêmes pour développer leur entreprise familiale.
La visite avec Guy et Odette dure toute la matinée, et nous avons la chance de voir tous les stades de la production, c’est vraiment passionnant ! Merci à vous.
Et quelles effluves envoûtantes autour des claies de séchage dans le jardin au bord du lagon !
Nous poursuivons cette belle journée « verte », par une jolie randonnée : celle des «trois cascades ». A ce moment-là, comme d’habitude, l’enthousiasme des enfants baisse généralement d’un cran au cours de la phase de négociation (les rouages familiaux sont bien connus…), mais, une fois sur le sentier, ça va mieux.
Et nos petits, au fil des années, sont devenus de bons marcheurs.
Cette ballade d’environ 3 heures débute sur la côte est au PK 6, bambous géants, mapés (arbre à bois blanc, dont les racines forment des contreforts qui garnissent la base du tronc, et dont le fruit ressemble à une châtaigne, comestible), fougères, gingembre, composent un superbe décor végétal. Certains passages sont équipés d’une corde. L’arrivée à la 3ème cascade est une récompense, la chute d’eau mesure une soixantaine de mètres et l’on se baigne dans la vasque.
J’aime ces journées où je découvre l’intérieur des îles et leurs richesses. Je me souviens curieusement toujours mieux des choses de la terre quand je foule les sentiers et respire les odeurs, que de celles en mer ou au mouillage, pour lesquelles ma mémoire finit toujours par mélanger les choses… Olivier y voit une signification…
Nous profitons aussi d’être à Raiatea pour aller à Uturoa, le bourg principal de l’île, bien achalandé : nous y faisons des appros, y voyons un médecin pour Marin qui lui délivre son certificat médical d’aptitude à la plongée sous-marine (son stage débute la semaine prochaine à Tahaa, l’île jumelle de Raiatea, qui partagent le même lagon), et Timothée et Capucine y font quelques emplettes qu’ils ramèneront en France en guise de souvenirs de leur séjour polynésien.
Dimanche 25 juillet, nous accompagnons nos vacanciers à l’aéroport de Raiatea, en stop, le cœur gros. Après 5 semaines de vacances à bord de Jangada, trop vite passées, l’avion d’Air Tahiti emmène Timothée et Capucine vers Papeete. Ils embarquent le soir même pour Paris…
Nous revenons à bord, tristounets. Demain à l’aube, nous gagnerons Tahaa.
Barbara
Le marae de Taputapuatea, à Raiatea.
Le marae est constitué d'une grande plate-forme dallée et d'un long ahu ( autel).
L'équipage de Jangada passionné par les marae...
Le site est paisible sur la côte sud-est de l'île.
Les ombrières à l'abri desquelles poussent les lianes de vanille.
Fleur de vanille...
Le mariage de la vanille. Fécondation manuelle.
Les gousses de vanilles qui brunissent sur pied.
Séchage de la vanille au soleil.
Adélie et Capucine à l'arrivée de la 3ème cascade.
Bain sous la cascade fraiche...
...et ravigotante!
Adieux des deux amies chéries à l 'aéroport de Raiatea.
Encore de long mois de séparation en perspective pour Adélie et Timothée.
Nous 5 réunis, avant une nouvelle et trop longue séparation...