dimanche 8 janvier 2012

MESSAGE N°7 – DOUBLER le CAP des AIGUILLES, et puis BONNE-ESPERANCE !!!


Convoyage Richards Bay/Saldanha – Afrique du Sud    
JOUR 7 –  Dimanche 8 Janvier 2012

Finalement, ce n’est pas si facile d’obliger un voilier à aller doucement quand tous les éléments se conjuguent pour qu’il avance vite. Même avec la grand-voile au bas ris et rien devant, on a vite dépassé les 7,5 nœuds, vitesse maximum qui était sensée nous permettre de voir le soleil se lever sur le Cap de Bonne-Espérance…
Une nuit de pleine lune, quelques nuages bas qui couraient vite vers le nord, une ligne de côte tourmentée et montagneuse, la température en chute libre, de l’humidité sur le pont très vite, on sentait bien hier soir que ce segment de côte compris entre le Cap des Aiguilles et le Cap de Bonne –Espérance avait de la puissance sous le pied. Sûrement pas un coin où il faut traînailler. Mais c’était grandiose de longer la terre sous la clarté de la lune. J’ai encore aperçu quelques phoques avant l’obscurité, et puis nous avons repris les mêmes dispositions pour la nuit que la veille. Les filles en bas, les garçons en haut.
La température de l’eau était passée à 15°C à 22H00. Puis le vent a commencé à reprendre du souffle, et j’ai vite compris que nous serions à Cape Point avant le jour. J’ai tracé une nouvelle route un peu plus au large, car les abords sud de la péninsule du Cap sont assez mal pavés. Plusieurs bancs rocheux la débordent, sur lesquels la mer brise violemment dès qu’elle est formée. Vers minuit, le vent s’est mis à chantonner dans le gréement, signe qu’on a dépassé les 25 nœuds apparents. Le bateau, poussé par la mer et le courant, filait une dizaine de nœuds, et nous sommes vite parvenus à l’ouvert de False Bay. Comme nous nous y attendions, parce que c’est la règle quand on approche du Cap de Bonne-Espérance, le vent est monté à 35 nœuds au sud de False Bay, et le bateau a commencé à partir à 12, 14 et 16 nœuds… Difficile de le ralentir. Le phare de Cape Point a défilé assez vite sur tribord, et j’ai noté le passage nord-sud du Cap de Bonne-Espérance (approximativement, car ce cap, aussi fameux soit-il, ne porte de phare) vers 03H05. La mer déferlait parfois, pas vraiment dangereuse mais déjà sérieuse, et j’ai été soulagé de pouvoir amorcer, une heure plus tard, notre changement de route vers le nord. Sous le vent de la péninsule, les vagues étaient moins grosses, plus régulières, le plus dur était passé. Le jour s’est levé, un peu blafard, légèrement brumeux. Le vent a molli par le travers de Hout Bay, il y avait une buée inhabituelle sur les vitrages du roof, et je n’avais pas envie de quitter ma polaire. Cela m’a poussé à regarder la température de l’eau de mer : 10°C ! Nous voilà en plein courant froid de Benguela…
L’arrière de la Table Mountain est apparu, puis Lion’s Head, au-dessus du quartier de Clifton.
Puis Robben Island.
Après avoir passé 10 jours à Cape Town et dans les environs, et sachant que le Royal Cape Yacht Club ne pouvait nous accueillir, nous avons décidé de profiter du vent favorable pour rejoindre la lagune de Saldahna, à une soixantaine de milles au nord de Cape Town. Nous sommes passés à proximité de Dassen Island, une île plate qui ressemble à l’Ile de Sein, entourée de brisants, sur laquelle vivent des milliers d’oiseaux, de manchots et de phoques, mais où il est interdit de débarquer. Un peu plus tard, j’ai du manœuvrer pour éviter une grosse baleine qui somnolait en surface. Vers 16H00, nous étions à l’entrée de la lagune de Saldanha, au milieu des phoques qui nous accompagnés en mer toute la journée, et de nombreux oiseaux. Le vent s’est mis à souffler à nouveau à 35 nœuds sur cette côte basse, sablonneuse, et semi-désertique, qui préfigure le désert du Namib. La grand-voile ne voulait plus descendre !
Saldanha est avant tout un port minéralier et un port de pêche. Le petit Yacht-Club est quand même bien sympa, et nous étions heureux de pouvoir prendre le dernier coffre disponible sur rade, ce qui nous assure une nuit paisible.
Mais le principal évènement du jour, c’est bien sûr que nous avons ce soir contourné l’Afrique du Sud, et finalement dans d’assez bonnes conditions. 3 jours pour rallier Knysna depuis Richards’Bay, et un peu plus de 2 jours pour atteindre Saldanha depuis Knysna. Un convoyage rapide à la mer, dont nous ne sommes pas mécontents.
Devant nos étraves désormais, l’Atlantique, les caps dirigés vers le nord, à nouveau les tropiques d’ici quelques centaines de milles, bientôt le soleil, les mers bleues, les alizés, les poissons à la ligne de traîne, et, en ligne de mire, encore loin, mais qui n’a jamais été aussi proche, la ligne d’arrivée d’un long voyage…
A bientôt.
Olivier
 (Fin de la série des messages « Convoyage Afrique du Sud »)